Extension de la jurisprudence Czabaj aux décisions d’espèce
Dans une décision de chambres réunies du 25 septembre 2020 SCI La Chaumière, le Conseil d’Etat étend la jurisprudence Czabaj aux décisions d’espèce. (CE, 8-3 chr, 25 sept. 2020, n° 430945. Lire en ligne : https://www.doctrine.fr/d/CE/2020/CEW:FR:CECHR:2020:430945.20200925)
Aux termes de l’article L. 318-3 du code de l’urbanisme dans sa version applicable au litige (l’article a depuis été modifié par l’article 5 de l’ordonnance du 23 octobre 2015 n°2015-1341 relative aux dispositions législatives du code des relations entre le public et l’administration :
” La propriété des voies privées ouvertes à la circulation publique dans des ensembles d’habitations peut, après enquête publique, être transférée d’office sans indemnité dans le domaine public de la commune sur le territoire de laquelle ces voies sont situées. / La décision de l’autorité administrative portant transfert vaut classement dans le domaine public et éteint, par elle-même et à sa date, tous droits réels et personnels existant sur les biens transférés. / Cette décision est prise par délibération du conseil municipal. Si un propriétaire intéressé a fait connaître son opposition, cette décision est prise par arrêté du représentant de l’Etat dans le département, à la demande de la commune (…) “.
La commune de Megève ayant voulu intégrer diverses parcelles dans son domaine public par ce procédé, certains propriétaires ont exercé un recours contre l’arrêté préfectoral prononçant le transfert.
L’arrêté, notifié aux propriétaires, n’était pas accompagné de l’indication des voies et délais de recours comme le prescrit pourtant R. 421-5 du code de justice administrative aux termes duquel “Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu’à la condition d’avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision”.
On le sait, malgré les termes très clairs de l’article précité le Conseil d’Etat a posé dans sa jurisprudence Czabaj que “le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l’effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d’une telle notification, que celui-ci a eu connaissance” (CE, Ass. 13 juillet 2016, M. Czabaj, req. n°387763). Il en déduit qu’une décision individuelle dont la notification n’a pas été accompagnée de l’indication des voies et délais de recours peut être contestée devant le juge administratif que dans le délai d’un an.
Cette exception initiale a été accompagnée de beaucoup d’autres (Caroline Lantero et Yann Livenais, “2018 : L’année Czabaj” : Revue générale du droit on line, 2018, numéro 29955 www.revuegeneraledudroit.eu/?p=29955). C’est semble-t-il la première fois que le Conseil d’Etat applique la jurisprudence Czabaj à une décision d’espèce.